Réalisé Par Ulrich Sima Ella
A 26 ans, Marcel Tisserand s’apprête à disputer sa deuxième Coupe d’Afrique des nations, en Egypte. Le Congolais né en France rêve de ramener un trophée en RDC. Et pourquoi pas celui décerné au vainqueur de la CAN 2019, même si le défenseur sait que les « Léopards » ont des défauts à corriger avant d’aller au bout ?
Le SPORTIF : Marcel Tisserand, la République démocratique du Congo débute sa CAN 2019 aujourd’hui. Peut-on la considérer comme l’un des favoris ?
Marcel Tisserand : Je ne pense pas qu’on peut prétendre à ce statut. En revanche, l’Egypte part avec un net avantage. Elle joue à domicile, elle a déjà remporté la compétition à plusieurs reprises (sept fois, Ndlr). Et puis il y a le Sénégal avec Sadio Mané, le Cameroun aussi qui est tenant du titre… Nous, on n’est pas favoris mais on a une équipe qui dérange, qui peut poser des problèmes. Les gens disent de nous qu’on a beaucoup de talent, ça veut bien dire qu’on fait peur ! Mais ça ne suffit pas, il faut vraiment qu’on fasse preuve d’abnégation et d’agressivité. Si on n’apporte pas tout ça sur le terrain et qu’on manque de rigueur, les autres équipes vont nous marcher dessus.
Les « Léopards » disputent pourtant leur 4ème CAN consécutive. Que manque-t-il à votre équipe pour progresser ?
Notre identité, c’est d’être une équipe imprévisible. Ce qu’il faut savoir, c’est qu’en RDC, on est des joueurs très festifs, on est très généreux… et ça se retrouve sur le terrain ! Parfois, au lieu de faire la passe, on va tenter un petit dribble, mais c’est à double tranchant. Cela peut nous faire gagner des matches mais ça peut aussi nous porter préjudice. C’est le paradoxe, on a les défauts de nos qualités…
Vous dites que l’équipe manque de rigueur ?
Ça, c’est mon côté défenseur (rires) ! En plus, je joue en Allemagne, donc je suis habitué à ce que ce soit plutôt carré !
On joue tous dans des championnats différents, on a des caractéristiques différentes mais on doit savoir que certains gestes ne doivent être effectués que dans certaines zones du terrain. On doit travailler ça.
Après, on a tellement de talent, surtout offensivement, que c’est impossible de demander aux attaquants de ne pas jouer leur jeu… Parce qu’à tout moment, ça peut déboucher sur quelque chose de positif !
Vous avez rejoint la sélection en 2016, c’est votre deuxième CAN à titre personnel, sentez-vous définitivement intégré au sein des Léopards ?
J’ai commencé tôt avec les sélections congolaises. J’ai joué avec les Espoirs et j’ai retrouvé plusieurs de mes coéquipiers chez les « A ».
Je m’entends bien avec les francophones mais globalement je suis proche de tout le monde, de ceux qui jouent au pays également. Je parle la langue, je la comprends parfaitement, donc les autres joueurs se sont dit que je faisais des efforts pour m’intégrer. On écoute le même genre de musique, Koffi Olomidé, Fally Ipoupa, des artistes congolais…
Donc c’est plus facile de s’intégrer de cette manière. Ce n’était pas forcément évident au départ. Il fallait faire ses preuves mais aujourd’hui, ça se passe parfaitement bien.
Quel est le partenaire avec qui vous vous entendez le mieux dans cette sélection ?
Je suis proche de Youssouf Mulumbu (forfait contre l’Ouganda, Ndlr), on partage la même chambre. On vient du même milieu, on a grandi dans le même quartier, on est très heureux de se retrouver ensemble en sélection. Bon, c’est vrai qu’il est têtu (rires) ! On va souvent se prendre la tête sur le terrain mais ce qui est bien chez lui, c’est qu’il relativise très vite. J’apprécie ça chez lui. C’est pour ça qu’il est notre capitaine. Les joueurs ont beaucoup de respect pour lui. Il a traversé beaucoup d’épreuves avec la sélection, il a connu pas mal d’entraîneurs aussi… Il a joué en Premier League, il a beaucoup d’expérience… Youssouf a cette aura qui permet aux autres de se sublimer.
Vous n’avez que 26 ans, vous avez encore de belles années de carrière devant vous. Quels sont vos objectifs avec la sélection ?
J’aimerais déjà qualifier mon pays pour la Coupe du monde. On était à deux doigts d’y parvenir la dernière fois, ça nous a fait très mal (La RDC avait été éliminée à cause d’un match nul 2-2 contre la Tunisie alors qu’elle menait 2-0, Ndlr). C’est l’une des plus plus grosses déceptions de ma carrière parce qu’on aurait marqué l’histoire du pays, on se serait souvenu de nous très très longtemps…
Mais malgré tout, je préfèrerais tout de même gagner la CAN. Ramener un trophée à la RDC, ça resterait gravé…
Pourquoi pas dès cette année ? Ce serait extraordinaire.